1892 – 1984 : Née à Tcheboksary en Tchouvachie le 14 février 1892, fille naturelle d’un aristocrate polonais, le vicomte Bronislav Stebelski et de l’artiste juive Maria Rosanovitch native de Kazan (qui deviendra plus tard l’épouse d’Alexandre Vorobieff avec qui elle eut une autre fille Nina), Marie Vorobiev-Stebelska fit ses premières études à Tbilissi, puis, en 1910, à Moscou, à l’académie des Beaux-Arts Stroganov où elle découvre les Primitifs italiens, l’Impressionnisme et le Fauvisme. Débute alors sa vie de nomade. Bien loin du Caucase et des steppes sauvages russes ainsi que des bulbes dorés de la cité de Moscou, c’est d’abord à Capri qu’elle se rend en 1911 et y rencontre Maxime Gorki qui la surnomme Marevna, du nom de « la petite princesse de la mer » d’un conte de fées russe. Elle est fiancée avec Yura Andreyevich, le fils de Gorki, mais le mariage ne se fera pas. Néanmoins ils demeurent excellents amis.Elle arrive à Paris à la gare de Lyon en 1912 pour poursuivre ses études et rejoint La Ruche, un foyer pour artistes immigrés qui, bien plus tard, lui inspirera un livre Life with the Painters of La Ruche. Elle commence à l’académie Zuloaga, puis, en 1913, à l’Académie Colarossi. Elle suit ensuite les cours de l’académie Russe fondée en 1906 par Marie Vassilieff où se retrouvent Chana Orloff, Jacques Lipchitz et Ossip Zadkine. Yura Andreyevich la présente aux amis de son père, Maximilian Volochine, Boris Savinkov et le poète Ilya Ehrenbourg. Elle fréquente beaucoup les immigrés russes dont le peintre Chaïm Soutine et, au café «La Rotonde», les peintres de Montparnasse qui deviennent ses amis : Marc Chagall, Moïse Kisling, Amadeo Modigliani, Fernand Léger, Georges Braque, Henri Matisse, Foujita et Pablo Picasso. Elle se lie d’amitié également avec les poètes Max Jacob, Guillaume Apollinaire et Jean Cocteau. Elle expose aux Tuileries dès 1912, aux Indépendants en 1913. En 1914, son père, très malade, se donne la mort. L’oncle de Marevna coupe définitivement les ponts. Elle doit alors se débrouiller seule. Pour oublier sa tristesse, elle choisit de partir en voyage grâce à des dons de ses amis de Montparnasse à Portofino, Biarritz, en Espagne et à Èze. De retour à Paris, Ilya Ehrenbourg lui donne un recueil de poèmes à illustrer. Elle rencontre ses premiers mécènes, Léon Zamaron et Gustave Kahn. Picasso, qui l’admire beaucoup et qui devient un ami fidèle, lui dit « Nous ferons de toi une artiste encore plus célèbre que Marie Laurencin ». Elle peint ces figures illustres sur de grandes toiles reproduisant leurs traits et leurs expressions pour de saisissantes ressemblances. Marevna excelle dans le portrait. Elle possède une pureté et une fraîcheur très vite remarquées. Elle tire son indépendance de sa peinture, même si elle vit dans un univers d’hommes. Elle a trouvé sa technique picturale : rythmes saccadés, facettes géométriques, larges traits séparant des plages colorées. Elle fut la première femme à adopter le cubisme et, inspirée par le pointillisme de Seurat, elle associera les deux styles.En 1915, le marchand de tableaux Léonce Rosenberg vend les toiles qu’elle a peintes au tout début. Elle expose au Salon d’automne en 1919. Elle rencontre le peintre mexicain Diego Rivera. Bien qu’il soit déjà marié avec Angelina Beloff, la compatriote et amie de Marevna, il entraîne Marevna dans leur studio de la rue du Départ sous prétexte de la soigner et la séduit. Leur liaison passionnée et tumultueuse durera 6 ans, mais Il restera pour toujours l’amour de sa vie. Angelina mit entre temps au monde un garçon, Diego qui mourut bien vite. Marevna fleurira souvent sa tombe au cimetière de Montrouge. En 1919, Diego et Marevna ont une fille prénommée Marika. Il loue pour elles une maison à Chatillon, où il vient les voir et passer quelques moments heureux. Élie Faure, historien d’art, qui est le parrain de Marika, les visite souvent et conseille vivement à Rivera d’étudier les primitifs italiens. Rivera les quitte en 1921 pour retourner au Mexique où son père est gravement malade. Il épouse alors Lupe Marin, dont il aura deux autres filles, Ruth et Guadelupe. Diego trompait toujours ses femmes avec soit leurs amies, soit leurs sœurs. Ainsi, il devait épouser une autre de ses conquêtes parmi ses modèles et élèves, celle qui devait devenir son égérie, Frida Kahlo. Il la trompera avec sa sœur Christina et avec son amie Tina Modotti. Néanmoins Frida devient une égérie révolutionnaire et la sienne. Quant à Marevna, grâce à des mécènes tels que le célèbre commissaire-priseur Léon Zamaron et Léopold Zborowski, elle vend ses œuvres. Paul Poiret achète aussi ses écharpes et cravates aux motifs russes colorés. Tout en continuant sa carrière de peintre, elle élève sa fille. Cette dernière suivra des cours à l’École de Danse d’Isadora Duncan et deviendra danseuse chorégraphe classique. Elle épousera en 1938 à la mairie de Cannes le peintre Jean Paul Brusset, ami de Tristan Bernard et de Jean Cocteau. Brusset est pendant les années 1930 et 40 le Directeur artistique du Palm Beach de Cannes. il décore les grands Galas, les spectacles de sa femme, le Bal des Petits Lits Blancs, et le nouveau Festival International du Film. Marevna les suit sur la Côte d’Azur. De leur union naîtra un fils, Jean-Diego Brusset en 1941.n 1942, Marika et Jean Paul Brusset rejoignent les Forces françaises libres en Afrique du Nord à Alger puis à Tunis. Marevna a la tâche d’éduquer le petit Jean Diego. C’est cette même année qu’elle plante son chevalet à la proue de ce vaisseau de pierre qu’est Saint-Paul-de-Vence. Elle loue chez Paul Roux un studio derrière « la Colombe d’Or » pour y installer son atelier. Elle peint maintes fois les remparts du vieux village, les faisant scintiller, à travers le prisme de son pointillisme, dans la lumière azuréenne. À Saint-Paul, elle rencontre en 1945 André Verdet, résistant, déporté et Chantre du Village et ainsi commence une longue amitié. De retour du maquis, le gendre de Marevna devient l’ami de Marguerite et d’Aimé Maeght qui crééront une Fondation portant leur nom]. Aimé Maeght expose en 1946 les œuvres de Jean Paul Brusset qu’il appelle affectueusement « mon petit Paul ». Brusset décore le Bar de «la Colombe d’Or» de son ami Paul Roux. En 1946, Marika divorcée, fait la connaissance de Rodney Phillips, un britannique à Saint-Paul. Ils se lient d’amitié avec Jacques Prévert, puis ils quittent la France pour s’installer en Angleterre, où ils se marient et ont un fils, Elie. Marevna suit alors sa fille au Royaume-Uni pour séjourner à Athelhampton Hall où la famille s’est installée en 1949, Elle y vit avec son gendre, sa fille, leur fils et bientôt le demi-frère de celui-ci. Elle se consacre pleinement à sa peinture. Néanmoins, elle prend soin amoureusement de Jean-Diego et d’Elie. Elle habitera à Londres de 1958 à sa mort. Cette même année 58 elle revoit son vieil ami Ilya Ehrenbourg. Dix ans plus tard elle participe à la rétrospective néo-impressionniste à la Fondation Guggenheim de New York. Le Docteur Oscar Ghez, président fondateur du Musée du Petit Palais à Genève possédait à l’époque d’après les médias dans ce musée autant de chefs-d’œuvre que ceux du Musée d’Orsay et de Beaubourg réunis. Il fait l’acquisition dès le début des années 1960 de plus de 150 toiles de l’artiste et ne cesse de l’encourager et d’exposer ses œuvres en France, en Suisse, aux États-Unis, au Japon et en Israël. Elle publie en 1979, ses Mémoires d’une nomade. Oscar Ghez sera à l’origine de l’exposition du centenaire de la naissance de Marevna à la galerie Wildenstein de Londres. Marevna s’éteint le 4 mai 1984, âgée de 92 ans. Aujourd’hui ses cendres reposent dans le parc du Musée Dolorès Olmedo Patiño à Mexico, dans le socle de la grande tête sculptée de Diego Rivera qu’elle aima malgré tout jusqu’à son dernier souffle. L’ancien secrétaire particulier de Dolores Olmedo a dit : » l’Esprit de Marevna est bien là ». Ainsi se termine le long voyage nomade de la « Petite Princesse de la Mer « .